À l’heure où la pénurie de main d’œuvre est monnaie courante, il arrive souvent que des postes restent inoccupés pendant des périodes prolongées. Si vous pensez que tant que les affaires tournent, il n’y a pas d’urgence et que cela vous permet au passage d’économiser des frais de personnel, vous vous trompez. Car un poste inoccupé coûte davantage que vous n’économisez en frais de personnel.
Les départements des ressources humaines notamment ont très souvent tendance à croire que l’on peut faire des économies en laissant vacants certains postes. Ils ne voient que le statu quo, avec même à la clé la possibilité de faire des économies par rapport à la configuration précédente.
Ce raisonnement fait malheureusement abstraction d’un élément essentiel, à savoir que sans employés, les affaires ne peuvent pas se développer. Car en définitive, tous les membres d’une entreprise contribuent dans une certaine mesure au chiffre d’affaires. Par conséquent, lorsqu’une personne quitte l’entreprise, elle emporte avec elle sa participation à la réussite globale de l’organisation. C’est précisément sur cette approche que repose le concept du coût de la vacance (Cost of Vacancy).
Composition
Outre la participation directe au chiffre d’affaires de l’entreprise, le coût de la vacance est constitué d’éléments difficilement chiffrables. Si la contribution au chiffre d’affaires est relativement facile à calculer à partir des chiffres clés, les répercussions non monétaires représentent en revanche un réel danger pour l’entreprise. En effet, elles entraînent des conséquences négatives pour les employés individuellement, pour toute l’équipe et par conséquent pour les clients et finalement l’entreprise entière.
Le manque de main-d’œuvre conduit à un ralentissement de tous les processus – de la réduction du nombre de coups de fil passés aux clients à la réalisation du bilan mensuel. Pour compenser au moins temporairement cet affaiblissement, le travail est réparti sur les employés restants, dont la charge de travail augmente en conséquence. Tant que cette situation reste momentanée et qu’elle ne dépasse pas quelques semaines, le risque de dommages graves est encore relativement limité. Mais si l’augmentation de la charge de travail s’inscrit dans la durée, elle fera inévitablement des dégâts à plus ou moins long terme.
Le simple fait de devoir travailler en réaction, c’est à dire ne plus s’occuper que des affaires urgentes, réduit déjà à néant tout potentiel d’innovation. Pire encore: cette situation finira par avoir un impact sur la performance des employés. Stressés et frustrés, ils perdront immanquablement de leur motivation. Ce cercle vicieux se traduira ensuite par des arrêts maladie et en définitive, par une hausse de la fluctuation du personnel.
Encore plus de postes vacants, encore plus de charge de travail, des processus encore plus lents et en fin de compte, des départs encore plus nombreux. La situation aura tôt fait de se savoir et portera préjudice à l’image de l’entreprise aux yeux des clients comme des collaborateurs potentiels. Les postes restent alors vacants toujours plus longtemps et l’entreprise entre dans une spirale négative.
Calcul
Il est très compliqué de calculer le montant précis du coût de vacance. Il implique un nombre trop important de facteurs qui ne peuvent pas toujours être précisément chiffrés. On considère néanmoins qu’à partir de 83 jours de vacance, un poste inoccupé coûte autant que le salaire annuel brut correspondant.
Pour un calcul plus précis, l’université de Harvard a mis au point une formule à laquelle la profession accorde une crédibilité élevée.
Sachant que :
- Le salaire annuel correspond au salaire annuel brut versé pour ce poste.
- Le dénominateur correspond au nombre moyen de jours travaillés par an.
- Le facteur représente le facteur de contribution du poste à la réalisation du chiffre d’affaires : il est compris entre 1 (contribution assez indirecte) et 3 (contribution directe).
- Le Time to Hire correspond à la durée moyenne nécessaire pour pourvoir à nouveau le poste.
Prenons l’exemple d’un Content Manager à Zurich : pour une moyenne de 254 jours travaillés à Zurich en 2021, il a gagné 90 000 CHF. Son poste est affecté d’un facteur 2 car s’il s’occupe de manière autonome des clients sans en gagner de nouveaux pour autant. On part en outre du principe qu’il faut en moyenne 100 jours pour pourvoir à nouveau le poste. On obtient donc :
Cela signifie qu’au bout de 100 jours seulement, ce poste coûte à l’entreprise plus de deux tiers de ce qu’il lui coûterait sur une année en étant pourvu.
Implications
Le coût de vacance répond à deux finalités. Il permet d’une part de comparer entre elles différentes vacances de postes afin de les prioriser – bien que le coût de vacance ne soit pas forcément le seul facteur à prendre en compte.
D’autre part, et c’est l’aspect de loin le plus important, cette valeur permet dans une prochaine étape de définir le budget alloué au recrutement. Il donne une idée des sommes à investir dans des mesures de recrutement (de la simple publication d’offres d’emploi au recours aux services d’un chasseur de tête externe).
Conclusion
En plus de coûter de l’argent, les postes vacants constituent une menace pour l’harmonie de l’entreprise, pour la satisfaction client et finalement pour l’entreprise dans son ensemble si vous ignorez tous les signaux d’alerte. On pourrait presque parler des risques dus à la vacance de postes («Risks due to Vacancy»).
Bilan : si vous n’avez encore jamais rencontré de problèmes liés à des postes vacants, vous pouvez être très reconnaissant à vos employés pour leur engagement, et leur adresser toutes vos excuses pour avoir été aussi aveugle, puis leur accorder une généreuse augmentation de salaire – dans cet ordre-là de préférence. Car ce sont vos employés qui encaissent les erreurs de management et qui continuent de faire tourner la boutique!
Vous avez un poste vacant ?